Le vivant est résilient






 "Je ne suis pas optimiste pour le climat, mais oui, je le suis pour la biodiversité. Parce que le vivant est résilient, et que les dégâts peuvent être réversibles"

Ainsi s'exprime le paléontologue et biologiste Marin Bruno DAVID(*) dans une interview que lui consacre Télérama  dans son numéro daté du 14/06/2023.

Loin d'avoir voulu écrire un roman anxiogène (les lecteurs projettent facilement leurs propres angoisses dans une dystopie), j'ai souhaité procéder de la  façon dont le président du Muséum national d’Histoire naturelle aborde la problématique:  en toute objectivité. Par le fait, mon roman Obsolète abonde dans le sens des solutions qu'il préconise.  

Nous sommes à l'aube d'une sixième extinction, que contrairement aux précédentes, nous avons nous-même engendrée. Il ne tient qu'à nous - et nous nous sommes déjà prouvé en être capable - de virer de bord. 
Les solutions sont entre nos mains. 
Quand on protège certaines espèces d'animaux et organismes vivants, ils se redéveloppent - c'est le cas des grands rapaces, des ours, des loups, de coraux ou de certains singes. "Nos rivières et nos faunes piscicoles sont en meilleur état que dans les années 1970 ou 1980", nous dit Bruno DAVID. Encore faut-il qu'on arrête enfin de déverser autant de pesticides dans les champs..."  

Bruno DAVID (@DR)

Les états, les entreprises, les individus... Chacun de nous détient, par son comportement, son bilan carbone et son bulletin de vote, une partie de la solution.

"Il est urgent d'orienter les subventions publiques vers le train - dont les prix sont exorbitants", dit-il encore dans cet article, "et de taxer fortement le kérosène des avions. Il faut calculer le coût réel des choses en incluant le coût environnemental." 
Se poser la question systématiquement de nos déplacements professionnels et touristiques : J'y vais, ou pas ? Est-ce que plutôt que d'aller à l'autre bout du monde pour un séminaire d'une journée, un visioconférence ne serait pas mieux pour la planète ? 

@MyEdit

Bruno DAVID, enfant, vidait les poubelles de ses grands-parents dans la rivière parce qu'en 1965, il n'y avait pas de ramassage d'ordures dans leur village. Mais ces ordures étaient écologiques : pas de plastique, pas de verre, juste des épluchures emballées dans du papier journal. "Dans leur maison, on se lavait à l'évier, les toilettes étaient dans la cour, sans chasse d'eau. (...) Ma grand-mère paternelle, elle, n'avait pas de frigo. Elle conservait le beurre dans un récipient rempli d'eau pour éviter qu'il fonde en été."

On a du mal à l'imaginer mais la France d'après guerre était encore très rurale, et beaucoup plus économe, respectueuse de l'environnement sans chercher à l'être. Je me souviens d'une photo de moi, à 1 an, en 1967, toute nue dans une bassine en fer blanc, où l'on me faisait faire ma toilette, chez mes arrières grands-parents paternels qui habitaient la campagne bordelaise. Et j'ai la même photo avec mon fils, en 2008, qui prend son bain chez ses grand-parents dans une bassine en plastique, car ils n'ont pas de baignoire mais une douche. Cela en dit tant sur la révolution de l'industrie plasturgique...

@MyEdit

Un changement de modèle agricole

Le paléontologue préconise avant tout un changement de modèle agricole. Il est clair qu'être "une puissance agricole" pour un pays n'a plus aucun sens (sous toutefois cela a eu un sens un jour). Parler d'une "agriculture auto-suffisante" devrait plutôt intégrer les discours de nos représentants politiques et celui des fédérations agricoles de nos pays. Les agriculteurs, poussés au surproductivisme, sont sous perfusions d'aides européennes. On épuise et on empoisonne la terre comme on remplirait d'eau une jarre fêlée. Un non sens.

"Cessons de déverser de la chimie dans les sols", dit encore le paléontologue. "Plantons 1%de haies sur la surface de la Beauce et de la Brie, par exemple. On transformera le paysage des grandes plaines agricoles, on changera la façon dont la vie peut s'y développer, et cela permettra de retenir l'eau dans les sols. On dit que ce modèle actuel nourrit la planète, mais on engendre 30% de gaspillage alimentaire!"

"On n'a pas le choix, soit on s'adapte, soit on meurt. Et pour une fois, c'est une démarche politique responsable, à long terme."

S'adapter ne veut pas dire s'acclimater, c'est à dire tenter de continuer de vivre comme avant, en mettant en place des remèdes pire que le mal, comme par exemple, avec la création de mégabassines. Nous vivons déjà un emballement du système climatique qui nous mène non pas vers 4° de plus au thermomètre mais probablement  6 ou 7°. 
Oui, nous fonçons droit dans le mur.

Obsolète, en présentant ce que serait notre futur dans ces conditions difficiles, avec une humanité devenue raisonnable et qui a su s'adapter, nous projette en toute objectivité vers ce changement climatique globalisé, cumulatif. 
Car les gaz à effet de serre accumulés depuis des décennies, vont continuer à réchauffer l'atmosphère. 
Personne n'a encore trouvé un moyen de siphonner le ciel. 
Et la prochaine ère glaciaire n'est pas prévue avant cent mille ans. 

Il est urgent d'arrêter de jouer aux cons et de mettre à la tête de nos gouvernances des hommes et des femmes qui ne font pas de politique mais s'appliquent à mener à bien la seule mission qui vaille aujourd'hui : sauver le monde.

@MyEdit

*Bruno DAVID est président du Muséum national d’Histoire naturelle depuis 2015.
Il a été chercheur au CNRS et directeur de l’unité Biogéosciences à l’Université de Bourgogne. Paléontologue et biologiste marin, ses recherches l’ont conduit à explorer l’évolution de la biodiversité à partir de modèles actuels comme fossiles. Bruno David a participé à plusieurs grandes missions océanographiques, notamment dans l’Océan Austral, la mer des Caraïbes et dans le Pacifique avec le submersible Nautile.